#3 Je suis BIIIIIIIIIP... Mais je ne me soignerai pas !

Pendant longtemps je me suis demandée à quel moment ça avait merdé pour moi ?
Maintenant je sais. Dès la naissance.
Moi aussi, j’aurai voulu rester dans le troupeau des normaux pensants.
Parce que… C’est plus tranquille. Parce que… Ce n’est jamais simple l’exil. Parce que… Etre le vilain petit canard, c’est pas cool.
Mais je n’ai pas réussi à me fondre dans la masse. Je ne suis pas arrivée à marcher à la même cadence que l’armada des gens certifiés conformes.
Je le regrette.
Mon câblage neuronal n’est pas programmé pour la pensée linéaire et chronologique.
Ma réflexion est par essence globale et en arborescence.
Je n’ai pas choisi. Je suis née comme ça.
Mon cerveau ne s’arrête que trop rarement d’analyser, d’appréhender, d’imaginer, d’anticiper, de détailler. Mes 5 sens (beaucoup plus développés que la moyenne) sont constamment bombardés d’informations sur les lieux, les gens, et les émotions des autres qui trainent dans l’air… C’est épuisant.
Un peu comme une carapace que tous les autres auraient sur eux et que vous n’auriez pas.
Heureusement, on est beaucoup dans mon cas.
Zèbres, hypersensibles, enfants indigo, surdoués, multi potentiels…
Quel serait le mot juste pour nous définir ? Nous qui sommes tellement différents les uns des autres mais qui nous reconnaissons à chaque fois que nous nous croisons.
Du point de vue de la société, en fait, on est les « trop ».
Côté jardin, on est le genre : trop émotif, trop rigolo, trop immature, trop excessif, trop pénible avec leur joie de vivre en bandoulière, trop fatigant avec leur question qui dérange…
Côté cour, ce serait plutôt : trop fragile, trop cyclothymique, trop mélancolique, trop en pleurs, trop en colère, trop intelligent…
Animé par l’amour, on ne ferait pas de mal à une mouche. En revanche, la plupart des gens mal à l’aise avec la différence nous craignent, nous jalousent ou tentent même parfois de nous détruire. Ca arrive aussi qu’on nous enferme avec les fous, parce que… « Toute vérité n’est pas bonne à dire. » Mais l’asile a l’avantage de savoir où on est. Car la plupart du temps le surdoué a plutôt la sensation d’avoir été largué dans la dernière version de Resident Evil.
En marge, hors cadre, original, sans motivation réelle pour l’appât du gain, mais en recherche perpétuelle de la beauté, de la justice, du détail parfait, de l’instant magique et de l’humour chirurgical.
En quête de sens, et toujours à l’affût des trop rares pépites, jamais cachées mais que les autres ne perçoivent même pas.
Donc c’est la normalité, la moyenne qui est l’étalon de mesure de l’humanité.
Mais pourquoi rabaisser l’homo sapiens à la paresse cérébrale de la majorité ? Car aux dernières nouvelles, à de rares exceptions près, le cortex fait partie de la version full options du modèle de base. Encore faut-il le mettre sur « ON ».
Au quotidien, beaucoup l’active et l’utilise en mode automatique. Mais il est heureux de constater qu’en chatouillant un peu la matière grise de chacun, la plupart comprend, adhère ou partage les analyses, concepts, idées, interrogations des grands masturbateurs de l’intellect. En revanche l’incohérence de l’individu lambda se révèle à chaque fois au moment du passage à l’acte. Il trébuche lorsqu’il faut mettre l’idée en application.